| Focus 1/4 | Lumière sur la photosynthèse

Quelques pionniers de la photosynthèse

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1. Les plantes ont besoin d’eau

J.B. van Helmont - photoynthese
Figure 1. Portrait de J.B. van Helmont, Aufgang…1683. [Crédit : Wellcome Collection. (CC BY)]
Jean-Baptiste Van Helmont (1579-1644), alchimiste, chimiste, physiologiste et médecin originaire des Pays-Bas (Figure 1), mesurant le poids d’eau absorbé par un saule dans des conditions de culture contrôlées et montré que l’eau contribue à la croissance des plantes. A noter aussi que c’est Van Helmont qui a mis en évidence scientifiquement l’existence des « gaz », vers 1610, et leur donna ce nom [1].

2. Les plantes produisent de l’oxygène

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Figure 2. A, Carl Wilhelm Scheele Okänd (1742-1786) – 1700-tal [Domaine public] ; B, Joseph Priestley par Ozias Humphrey (1742–1810) [Domaine public] ; C, Antoine de Lavoisier expliquant à son épouse le résultat de ses expériences, [Crédit Welcome Collection, CC BY]
Joseph Priestley (1732-1804), chimiste et théologien britannique (Figure 2), a montré que les plantes restauraient dans l’air (grâce à ce qui sera connu plus tard comme la photosynthèse) une propriété nécessaire à la vie animale, mais détruite par celle-ci (c’est la respiration). C’est de l’oxygène qu’il s’agit, gaz dont il est ainsi le co-découvreur (1774) avec Carl Wilhelm Scheele (1742-1786), chimiste suédois (Figure 2). A l’époque de Priestley, il n’était pas encore question d’oxygène, mais de la théorie du phlogistique [2].

Quelques années plus tard, en 1777, Antoine Laurent de Lavoisier (1743-1794), chimiste, philosophe et économiste français (Figure 2), remplace la théorie du phlogistique par la « théorie générale de la combustion ». Il donne le nom d’oxygène au gaz impliqué.

3. Plantes, oxygène et lumière

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Figure 3. A gauche, Jan Ingen-housz [auteur inconnu, domaine public] ; A droite, Prof. Th. W. Engelmann, date et auteurs inconnus, publié à Munich par J.F. Lehmann en 1909 [Domaine public]
En 1779, Jan Ingen-Housz (1730-1799), médecin et botaniste hollandais (Figure 3), va prolonger les observations de Priestley et démontrer le rôle de la lumière dans la production d’oxygène par les plantes. Ayant placé des plantes dans l’eau à la lumière et à l’obscurité, il constate que :

(1) la lumière est nécessaire pour la restauration de l’air par la plante (c’est la photosynthèse) ;

(2) seules les parties vertes de la plante sont impliquées dans cette restauration ;

(3) toutes les parties vivantes de la plante « endommagent » l’air, mais l’étendue de la restauration de l’air par une plante verte dépasse largement son effet nocif.

Un siècle plus tard Theodor Wilhelm Engelmann (1843-1909), physiologiste allemand (Figure 3), va démontrer le rôle de la couleur de la lumière dans une expérience réalisée avec des algues filamenteuses (de type spirogyre) illuminées à l’aide de spots de lumière colorée, puis d’un prisme, où des bactéries aérobies* servent d’indicateur de la production d’oxygène. La densité des bactéries était la plus élevée dans les régions illuminées par les lumières bleue et rouge.

4. Les plantes utilisent le dioxyde de carbone

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Figure 4. A, Jean Senebier [Domaine public] ; B, Nicolas-Théodore de Saussure [Domaine public] ; C, Jean-Baptiste Boussingault (gravure de Schultz d’après une photo de Pierre Petit [Domaine public].
Au 17e siècle, Van Helmont avait identifié le « gaz sylvestre » comme produit de la combustion du charbon de bois : il s’agissait en fait du gaz carbonique (ou dioxyde de carbone). Un siècle plus tard, Lavoisier a démontré que le dioxyde de carbone libéré par la respiration animale, ou par la combustion d’une chandelle, est formé de carbone et d’oxygène.

Jean Senebier (1742-1809), naturaliste, météorologue et pasteur suisse (Figure 4), a étudié les échanges gazeux entre les plantes et l’atmosphère. Il montre que les plantes absorbent du gaz carbonique et produisent de l’oxygène en présence de lumière et publie en 1783 un ouvrage intitulé « Recherches sur l’influence de la lumière solaire pour métamorphoser l’air fixe en air pur par la végétation ». Ces observations sont renforcées par celles de Nicolas-Théodore de Saussure (1767-1845), chimiste, biochimiste et botaniste suisse (Figure 5) : de Saussure démontre que les plantes ont besoin de gaz carbonique, mais aussi d’eau, de composés azotés et de sels minéraux pour assurer leur nutrition et leur croissance.

Jean-Baptiste Joseph Dieudonné Boussingault (1802-1887), chimiste, botaniste et agronome français, est considéré comme le fondateur de la chimie agricole moderne (Figure 4). Après avoir développé des techniques d’analyse de l’air, il démontre –vers 1860- que le volume de dioxygène gazeux dégagé par les plantes et le volume de CO2 absorbé sont quasi identiques.

5. Chlorophylle et chloroplastes

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Figure 5. A, Joseph Bienaimé Caventou par Catherine Buisson, 1930, d’après Elisa Desrivières, 1870 [CC BY 4.0] ; B, Pierre Joseph Pelletier, Lithographie par N. E. Maurin / Domaine public]
La chlorophylle a été isolée en 1816 par les chimistes et pharmaciens français Joseph Pelletier (1788-1842) et Joseph Caventou (1795–1877) qui lui ont donné son nom en référence à la couleur verte (chloro) des feuilles (phylle) ; (Figure 5).

Hugo von Mohl (1805-1872), botaniste allemand (Figure 6), donne en 1837 la première description détaillée de « Chlorophyllkörnern » (granules de chlorophylle) dans les feuilles vertes.

Arthur Meyer (1850-1922), botaniste, biologiste cellulaire et pharmacognosiste allemand (Figure 6), a été le premier à nommer et à décrire les structures contenant de la chlorophylle dans les chloroplastes (que Meyer appelle « autoplastes ») connus sous le nom de grana.

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Figure 6. A, Hugo von Mohl [Domaine public] ; B, Arthur Meyer [CC BY 4.0] ; C, Andreas Schimper [Domaine public]
Andreas Franz Wilhelm Schimper (1856-1901) est un botaniste français puis allemand (Figure 6). En 1880, Il établit que l’amidon est à la fois une source d’énergie stockée pour les plantes et un produit de la photosynthèse. En 1881, il montre que les grains d’amidon sont formés dans certains corps des cellules des plantes ; en 1883, il nomme ces corps « chloroplastes ». Cette même année, il montre que les chloroplastes proviennent de la division de chloroplastes préexistants.

6. Les plantes transforment l’énergie lumineuse : la photosynthèse

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Figure 7. A, Julius Robert Mayer, gravure de Friedrich Berrer (* 1839) [Domaine public]; B, Julius von Sachs [CC BY-SA 3.0] ; C, Charles Barnes (portrait tiré de la revue Botanical Gazette, Editeur John M. Coulter. Photographe inconnu [Domaine public])
Julius Robert Mayer (1814-1878), médecin et physicien allemand (Figure 7), avait formulé en 1845 – après Joule en 1842, et Nicolas Léonard Sadi Carnot (1796-1832) en 1831- le premier principe de la thermodynamique : l’énergie ne peut être ni créée ni détruite.  Il a proposé que les plantes convertissent l’énergie lumineuse en énergie chimique.

Julius von Sachs (1832-1897), botaniste allemand (Figure 7), a participé très activement au développement de la physiologie végétale. En particulier il démontre que les grains d’amidon présents dans les chloroplastes sont formés sous l’influence de la lumière.

cornelis van niel - photosynthese - pionniers decouverte photosynthese
Figure 8. C.B. van Niel. [Source : © 2017 Stanford University & Hopkins Marine Station, https://seaside.stanford.edu/topresent]
En 1893, Charles Barnes (1858-1910) propose que le processus biologique de « synthèse de molécules carbonée à partir d’acide carbonique, en présence de chlorophylle, sous l’influence de la lumière  » soit désigné sous le nom de « photosyntax » ou « photosynthèse ». Il a une préférence pour le premier terme, qu’il juge plus approprié, mais c’est finalement le terme  » photosynthèse  » qui sera retenu par la postérité. [3]

C’est finalement en 1930 que Cornelis Bernardus van Niel (1897-1985), microbiologiste néerlando-américain (Figure 8), démontre que la photosynthèse est une réaction d’oxydoréduction lumière-dépendante, dans laquelle l’hydrogène d’un composé oxydable (H2A) réduit le dioxyde de carbone en matériel cellulaire (CH2O)x. Cette réaction s’exprime selon l’équation :

CO2 + H2A + lumière → (CH2O)x + A2 + H2O.

 


Notes et références

Image de couverture. Joseph Priestley  [Source : Ozias Humphrey (1742–1810) / Domaine public]

[1] Lavoisier, très intéressé par les travaux de Van Helmont, relève que le mot gaz vient du mot hollandais ghoast qui signifie esprit. Il ajoute que les Anglais « expriment la même idée par le mot ghost et les Allemands par le mot geist ».

[2] La théorie du phlogistique est une théorie chimique qui expliquait la combustion en postulant l’existence d’un « élément-flamme » présent au sein des corps combustibles.

[3] Gest H. (2002) History of the word photosynthesis and evolution of its definition. Photosynth Res 73(1-3):7-10.


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