Le Maroc, une mosaïque de climats
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Le Maroc, situé à la croisée des climats tempéré au nord et tropical au sud, est un véritable carrefour où se rencontrent les masses d’air froides et chaudes, dont les effets changent au rythme des saisons. Grâce à ses caractéristiques géographiques uniques, entre reliefs montagneux et influences océaniques, le pays dévoile une mosaïque de climats aux multiples facettes. Cet article vous invite à explorer comment ces forces naturelles, alliées à la variabilité des facteurs climatiques, façonnent un climat marocain particulièrement sensible aux fluctuations et aux effets du changement climatique. Vous découvrirez au fil des pages comment la géographie marocaine métamorphose ces influences pour créer un environnement à la fois fascinant et vulnérable.
1. Position géographique du Maroc
2. Répartition des températures au Maroc
Les températures moyennes du mois le plus froid de janvier enregistrent les valeurs les plus faibles sur les sommets montagneux et les zones continentales (Figure 2) [2,3]. L’effet thermique tampon de l’océan est à remarquer au niveau des zones côtières qui enregistrent des valeurs plus clémentes.
3. Variabilité des pluies au Maroc
La répartition pluviométrique annuelle montre une forte variabilité spatiale (Figure 5). Les valeurs les plus élevées sont enregistrées sur les sommets montagneux du Rif (plus de 1200 mm/an) suivies par celle du Moyen Atlas (entre 1200 et 1000 mm/an). Les régions bénéficiant de conditions pluviométriques favorables (> 700 mm/an) ne couvrent que 7,1 % du territoire marocain. Les valeurs les plus basses, en dessous de 100 mm/an, se trouvent au Sud-est et à l’extrême Sud désertique du pays. Cette répartition montre non seulement une décroissance Nord-Sud des pluies, mais elle révèle aussi un gradient décroissant Ouest-Est qui est expliqué par les barrières montagneuses du Rif et de l’Atlas. Elle met aussi en évidence les pluies faibles, ne dépassant pas les 200 mm/an, au niveau de la plaine de Haouz et du bassin de la Moulouya. Les régions subdésertiques, recevant entre 200 et 100 mm/an, couvrent 78 % du territoire du pays. Le reste de la superficie du pays (17,9 %) est occupé par des régions semi-arides et arides à pluviométrie comprise entre 200 et 600 mm.
A une échelle temporelle plus réduite (quelques jours), les séquences humides/sèches prennent naissance à la suite de pénétrations d’air froid polaire d’altitude. L’air océanique d’ouest, malgré sa faible fréquence d’occurrence, est jugé le plus favorable à la survenue des épisodes pluvieux, notamment pour les régions ouvertes aux influences océaniques (Maroc atlantique, les montagnes du Rif et de l’Atlas). Ceci souligne le rôle capital de l’océan Atlantique dans les apports pluviométriques au Maroc. L’air venant du Nord contribue aux journées pluvieuses de la moitié nord du pays (ex. Tanger, Ifrane et Oujda). Plus au sud, la région présaharienne, montre la contribution de l’air venant d’Ouest en plus de celui arrivant du secteur SO dans les journées pluvieuses.
4. Les types de climats du Maroc
- climat méditerranéen (Cs : climat tempéré à été sec, c’est l’équivalent du climat méditerranéen),
- climat aride steppique (BSh : Climat steppique a été chaud et sec), climat aride désertique (BWh : climat de désert à été chaud et sec)
- climat méditerranéen de montagne (Ds : climat neigeux a été sec qui est rencontré uniquement les hauts sommets montagneux du pays).
La Figure 6 montre les diagrammes ombrothermiqueSe dit d’une représentation graphique combinant les données mensuelles des températures moyennes et des précipitations d’une station donnée. (La température et la pluie sont portées en ordonnée [1 °C = 2 mm de pluie]. L’intersection des deux courbes détermine une surface, caractéristique du climat de la station étudiée.) (selon l’indice de Gaussen-Bagnouls [4]) de diverses stations représentatives de divers types de climats au Maroc.
Cette classification place le Maroc au niveau des zones climatiques mondiales : tempéré au nord (de type C) et aride au sud (de Type B). Mais, tenant des comptes des spécificités biogéographiques de la partie orientale du pays, le qualificatif d’aride désertique (type BW) correspond en réalité aux bioclimats arides à hiver tempéré à frais selon la classification d’Emberger (voir Focus L’indice d’Emberger). Le long du littoral méditerranéen allant de Kebdana à El Hoceima, le bioclimat y est semi-aride à hiver tempéré. En outre, le bioclimat saharien et son équivalent désertique, selon Köppen, n’apparaissent qu’à partir des stations de Figuig et de Bouârfa.
4.1. Climat méditerranéen (Cs)
Le domaine climatique méditerranéen est cantonné sur la façade occidentale des continents entre 30° et 40° de latitude. Par définition, le climat méditerranéen (Cs) est caractérisé par une saison sèche. Il s’interpose entre le climat tempéré au nord et le climat désertique subtropical aride au sud. Une autre caractéristique est l’augmentation relativement forte du rayonnement solaire vers le sud.
En se dirigeant vers le sud, le climat méditerranéen (Cs) se dégrade vers des bioclimats semi-aride et aride (ou steppique-BSh) et des bioclimats hyperarides (ou désertique-BWh). Ces qualificatifs de steppique et de désertique, retenus dans la classification de Köppen, évoquent la dégradation désertique des climats méditerranéens à pluie d’hiver (Cs) dont il est difficile de cerner la limite méridionale à cause de la disposition du relief de l’Atlas [5].
4.2. Climat steppique a été chaud (BSh)
4.3. Climat désertique à été chaud (BWh)
4.4. Les climats de montagne et chutes de neige au Maroc (Ds)
Même si le minimum mensuel des températures minimales peut atteindre des valeurs critiques de -5.3°C en février à Ifrane (la valeur record est de -24°C en février 1935), il est insensé d’exclure le climat du relief montagneux du domaine climatique méditerranéen. Ce sont les chaînes de l’Atlas qui ont les caractères les plus typiquement méditerranéens, car elles sont marquées par une sécheresse estivale et parce qu’elles sont les seules où l’on retrouve toute la gamme bioclimatique du climagramme d’Emberger, depuis l’hyperaride jusqu’au perhumide, avec toutes les variantes thermiques altitudinales, du chaud à l’extrêmement froid. Cette diversité climatique confère aux montagnes marocaines une richesse au niveau des formations végétales et une biodiversité remarquable à l’échelle du domaine climatique méditerranéen.
Des risques de pluies orageuses durant la saison chaude peuvent survenir d’une façon brutale en régions de montagne. C’est l’exemple des pluies diluviennes de 1995 et 1999 dans la vallée de l’Ourika (Marrakech) qui ont été responsables de crues meurtrières. Les pluies d’été en régions montagneuses peuvent être accompagnées de chutes de grêle qui ont des impacts néfastes sur les rosacées. L’averse de grêle d’une taille supérieure à 5 mm, survenue le 6 juin 2020 dans la région Fès-Meknès, a été fortement perçue par la population surtout qu’elle a concerné non seulement les régions montagneuses du Moyen Atlas, mais aussi les villes avoisinantes comme Fès, Meknès et Taza.
4.5. Climat littoral atlantique et rôle du courant océanique des Canaries
Le courant froid des Canaries est considéré comme l’un des quatre principaux courants de frontière Est des océans qui sont affectées par le phénomène d’upwelling [9] côtier qui correspond à remontée d’eau froide profonde sur le plateau continental en compensant la dérive des eaux de surface vers le large, sous les actions combinées d’un vent favorable des alizés et de la rotation de la Terre. La côte atlantique marocaine est exclusivement traversée par ce courant qui est accompagné de remontées d’eau froides, variables dans le temps. Les eaux de surface, entrainées par le vent des Alizés, sont remplacées par de l’eau profonde froide qui rend le courant des Canaries encore plus froid. Ce courant froid déclenche une inversion thermique à la base de l’atmosphère qui est constatée depuis la ville de Casablanca, favorisant ainsi la condensation des basses couches atmosphériques au contact de la mer [10],[11]. Une brise marine fraîche et humide souffle vers le continent, aspirée par les courants ascendants au-dessus du continent qui s’échauffe. Mais cette inversion bloque les ascendances, empêche les précipitations et favorise les brouillards qui surviennent assez fréquemment à l’arrière-pays casablancais.
5. Messages à retenir
- La position géographique du Maroc, entre les latitudes tropicales au sud et tempérées au nord, le rend dépendant aux conditions atmosphériques tant en altitude qu’à la surface.
- Les conditions géographiques locales, telles que l’effet orographique, la continentalité, le bassin occidental de la mer Méditerranée, le courant froid des Canaries et la remontée des eaux profondes froides aux larges des côtes atlantiques marocaines (ou Upwellings), jouent un rôle déterminant dans la modulation du climat du Maroc.
- La moitié nord du pays bénéficie d’un climat méditerranéen, qui cède progressivement place, vers le sud, à un climat aride désertique et, vers l’est, à un climat aride steppique. Les chaînes montagneuses du Rif et de l’Atlas confèrent au pays des conditions climatiques méditerranéennes uniques, où l’on retrouve toutes les variantes bioclimatiques. La montagne marocaine, véritable château d’eau du pays, joue un rôle essentiel dans la formation des précipitations solides, telles que la neige, qui alimentent à la fois les nappes phréatiques et l’écoulement des eaux de surface. Les précipitations sur les sommets de l’Atlas assurent la durabilité des ressources en eau et des cultures dans les oasis, en générant un microclimat unique qui favorise leur prospérité.
- Sous l’influence des vents des Alizés, le courant océanique froid des Canaries exerce une influence marquée sur le climat du littoral saharien marocain, en apportant des températures plus fraîches et en modérant la chaleur intense propre à la région désertique du sud. Accompagné par les remontées d’eaux froides, ce phénomène atténue l’impact de la chaleur désertique, créant ainsi un climat plus tempéré le long de la côte. De plus, cette masse d’eau froide favorise la formation de brouillards marins et génère des microclimats spécifiques, qui jouent un rôle clé dans l’augmentation de l’humidité et le maintien de la végétation dans les zones côtières, notamment au sud de Sidi Ifni.
- Face à la variabilité climatique et aux effets potentiels du changement climatique, l’ensemble du pays est de plus en plus menacé par des crises de sécheresse plus longues et récurrentes qui sont accentuées par des élévations des températures diurnes et nocturnes et des vagues de chaleur de plus en plus longues. Ces effets, ressentis au cours de cette dernière décennie, se traduisent aujourd’hui par une crise de sécurité hydrique à l’échelle nationale. Ainsi, des mesures drastiques de gestion et d’économie d’eau sont devenues une priorité nationale pour l’adaptation et la résilience face au changement climatique, car sans une gestion durable de cette ressource vitale, notre avenir sera inévitablement compromis.
Notes et références
Image de couverture. Image satellite de surveillance du temps et du climat illustrant un système nuageux précipitant au large des côtes atlantiques alors que le Maroc est sous des conditions de stabilité atmosphérique et de sécheresse hivernale. Image prise le 18 décembre 2024. [Source © EUMETSAT, 2024]. (https://pics.eumetsat.int/viewer/index.html).
[1] Beck, H. E., et al. (2018). Present and future Köppen-Geiger climate classification maps at 1-km resolution. Scientific data, 5(1), 1-12. https://www.nature.com/articles/sdata2018214
[2] Les données CHELSA (Climatologies at High resolution for the Earth’s Land Surface Areas) sont un ensemble de données climatiques mondiales à très haute résolution (30 secondes d’arc, ~ 1 km) qui sont hébergées par l’Institut Fédéral Suisse de Recherches sur la Forêt, la Neige et le Paysage (WSL).
[3] Karger et al. (2017). Climatologies at high resolution for the earth’s land surface areas. Scientific Data 4, 170122. https://www.nature.com/articles/sdata2017122
[4] H. Gaussen & F. Bagnouls (1952) L’indice xérothermique. Bulletin de l’Association de Géographes Français Année 1952, pp. 10-16
[5] Tassin, C. (2012). Paysages végétaux du domaine méditerranéen. France : IRD. 421 p. https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers14-01/010055378.pdf.
[6] Delannoy, H. & Lecompte, M. (1980). Utilisation de l’analyse factorielle des correspondances pour l’étude, des précipitations quotidiennes: un exemple au Maroc. Méditerranée, Troisième série, Tome 40, pp. 29-36. https://www.persee.fr/doc/medit_0025-8296_1980_num_40_4_1952.
[7] Faute de moyens d’observation, ces aspects climatiques d’une échelle spatiale réduite ne sont pas encore élucidés par des travaux de recherche en climatologie marocaine.
[8] Enquête de terrain que nous avons menée en juin 2023 dans le cadre d’un projet national financé par le CNRST (Centre National de la Recherche Scientifique et Technique).
[9] Les écosystèmes d’upwelling (terme anglophone relatif aux remontées des eaux profondes) situés en bordures Est (ou EBUEs “Eastern Boundary Upwelling Ecosystems”) sont parmi les écosystèmes les plus productifs au monde. Ils couvrent une petite zone océanique (<1%) mais contribuent à 20% des prises mondiales de poissons.
[10] Leroux, M. (2002). Les climats subtropicaux dits « méditerranéens » et les climats de la Méditerranée (2e partie). L’information géographique. 66, 1, pp. 34-52. https://www.persee.fr/doc/ingeo_0020-0093_2001_num_65_4_2773
[11] Leroux, M. (2001). Les climats subtropicaux dits « méditerranéens » et les climats de la Méditerranée (1e partie). L’information géographique. 65, 4, pp. 304-320. https://www.persee.fr/doc/ingeo_0020-0093_2002_num_66_1_2788
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Pour citer cet article : HANCHANE Mohamed (16 janvier 2025), Le Maroc, une mosaïque de climats, Encyclopédie de l’Environnement. Consulté le 19 février 2025 [en ligne ISSN 2555-0950] url : https://www.encyclopedie-environnement.org/climat/climat-maroc/.
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