Poussée d’Archimède et portance
PDFPour compenser leur poids les gigantesques cargos qui parcourent les océans bénéficient de la poussée d’Archimède. Mais pourquoi sont-ils aussi stables et ne se renversent-ils jamais, même lorsque la mer est démontée ? Par comparaison, les oiseaux, les avions et les planeurs, beaucoup plus lourds que l’air, semblent réaliser une performance extraordinaire en volant, comme le majestueux vautour de l’image de couverture. Nous allons voir que c’est leur mouvement qui engendre une force, appelée portance, capable de compenser leur poids.
1. Retour sur le poids et la poussée d’Archimède
Dès qu’il est lâché, le caillou tombe sur le sol, attiré par son poids. Sa chute s’arrête lorsque son appui sur le sol lui fournit une force exactement opposée à son poids, que l’on appelle la réaction de cet appui (lien vers l’article Les lois de la dynamique). Le caillou est de nouveau en équilibre.
Les corps plongés dans un milieu fluide, comme l’air ou l’eau, sont soumis sur leur périphérie à des pressions, dont l’effet global au repos se ramène à la poussée d’Archimède [1], égale et opposée au poids du fluide déplacé. Dans l’exemple du caillou lâché dans l’air, cette poussée est beaucoup plus faible que son poids, puisque la densité de l’air est environ 3000 fois plus faible que celle d’une pierre. Le caillou lâché accélère donc fortement, conformément à la loi fondamentale de la dynamique. En revanche, un ballon tombe plus lentement que le caillou et peut même s’élever s’il est gonflé avec un gaz plus léger que l’air, comme l’hélium ou l’hydrogène. Dans l’eau, le caillou tombe aussi mais beaucoup moins vite que dans l’air. Au début de sa chute, cela tient au fait que la poussée d’Archimède est encore incapable de compenser son poids, mais le déséquilibre des deux forces est modéré parce que la densité de l’eau n’est que 3 fois plus faible que celle d’une pierre. Puis, quand sa vitesse de chute devient significative, la pénétration du caillou dans l’eau se heurte à une résistance, appelée traînée, suffisante pour stopper son accélération et imposer une limite à sa vitesse de chute (lien vers l’article Résistance à l’avancement, ou traînée).
Les sous-marins et les navires peuvent être en équilibre entre leur poids et la poussée d’Archimède. Mais cet équilibre est-il stable dans une mer agitée ? Limitons-nous à n’envisager que la perturbation la plus dangereuse, le roulis, et commençons par éliminer la surface libre en imaginant le cas d’un sous-marin en plongée. C’est une sorte de tube, dont la section droite possède une forme voisine de celle d’une ellipse, représentée sur la Figure 1. La poussée d’Archimède s’applique au point C, centre de gravité du volume [2] fluide déplacé, que l’on appelle le centre de poussée. La masse du sous-marin possède aussi un centre de gravité G, point d’application du poids, dont la position dépend de l’arrimage des masses qui composent ce véhicule. La position du centre de gravité peut donc varier. A l’équilibre, les points C et G sont alignés sur une même verticale. Imaginons une petite inclinaison de roulis. On voit immédiatement sur la Figure 1 que, si G est situé au-dessous de C, le couple formé par ces deux forces non alignées mais parallèles tend à ramener le sous-marin à l’équilibre. Si G est situé au-dessus de C, le couple tend au contraire à accentuer le déséquilibre. La condition de stabilité du sous-marin est donc claire : il est nécessaire de donner aux diverses masses qui composent ce submersible des positions telles que G soit au-dessous de C. C’est une condition relativement sévère.
La situation est différente dans le cas d’un navire de surface immergé dans un ensemble de deux fluides : l’eau et l’air. On pourrait penser que l’air ne compte pas parce qu’il est presque mille fois plus léger que l’eau. Ce qui est vrai c’est que la poussée de l’air est négligeable par rapport à celle de l’eau. Mais il serait inexact d’oublier totalement l’air, qui intervient par l’existence de la surface libre. La partie immergée du bateau est limitée par la carène et par la portion de surface libre supprimée par la présence du navire, que l’on appelle la surface de flottaison. Ensemble, la carène et la surface de flottaison limitent le volume immergé V. Distinguons les deux parties de la poussée d’Archimède, celle qui s’exerce à bâbord et celle qui s’exerce à tribord. Toute inclinaison du navire détruit la symétrie de ces deux poussées, dans un sens tel qu’il tend à restaurer l’équilibre du navire. C’est ce qui distingue le cas d’un navire de surface de celui du sous-marin.
Pour un volume immergé donné et pour un poids donné, la surface de flottaison peut être plus ou moins large. Lorsqu’elle est peu large, comme dans le cas d’une longue pirogue, lors d’une inclinaison de roulis, tous les points de cette surface sont proches de l’axe, de sorte que, le bras de levier étant court, le moment des forces de rappel dues à la pression de l’eau sur les bords de la carène demeure très modéré. Au contraire, lorsque la surface de flottaison est très large, comme dans le cas de la Figure 2, le couple de rappel peut être très grand, parce que la carène trouve une poussée augmentée assez loin du côté où penche le navire, et une poussée diminuée de l’autre côté. Autrement dit, le centre de poussée se décale assez fortement du côté où penche le navire, ce qui rend le bras de levier du couple de redressement important.
Ceci se traduit par l’existence d’un point qui n’a pas d’équivalent dans le cas des sous-marins, appelé le métacentre M, situé à la distance I/V au-dessus du centre de poussée C sur la ligne d’action de la poussée (verticale). Dans cette expression, I désigne le moment quadratique de la surface [3] de flottaison par rapport à son axe de symétrie. Lorsque le navire est soumis à de petites inclinaisons, le métacentre M demeure fixe et le point C décrit un arc de cercle de centre M et de rayon I/V. La condition de stabilité requiert que G soit au-dessous de M, et non pas de C. La différence par rapport au cas du sous-marin est importante : le navire peut être stable lorsque G est situé au-dessus de C, pourvu que le métacentre soit assez haut. Dans ces conditions, un sous-marin serait instable. Ceci exige que, toutes choses égales par ailleurs, la largeur l soit assez grande.
Une façon d’obtenir de grandes valeurs du rayon métacentrique I/V, de façon à garantir la stabilité du navire, consiste à doter celui-ci d’une double carène, dont aucune portion n’est proche de l’axe. Alors, presque toute la surface de flottaison étant éloignée de l’axe de symétrie, le rayon métacentrique peut devenir très grand. C’est le principe des catamarans. Les trimarans possèdent une carène principale assez vaste autour de l’axe, destinée à porter les équipements nécessaires à la navigation, mâts, voiles et cordages, mais aussi à abriter l’équipage, flanquée de deux carènes secondaires très légères à une certaine distance sur chacun des deux côtés. A l’équilibre, seule la carène centrale est partiellement immergée, mais une gîte modérée suffit à amener au contact de l’eau l’une des carènes latérales, qui trouve ainsi un appui supplémentaire, systématiquement stabilisant. Le couple de redressement dû à cette poussée latérale supplémentaire peut être important en raison de la longueur du bras de levier. Le trimaran représente donc une formule intermédiaire entre le navire monocoque et le catamaran, qui a l’avantage de devenir très stable pour des inclinaisons fortes.
3. La portance expliquée par le bilan des forces de pression
Qu’en est-il de ces objets volants comme les avions et les planeurs soumis à une poussée d’Archimède négligeable par rapport à leur poids puisqu’ils sont beaucoup plus lourds que l’air ? La force qui leur permet de s’envoler, puis de voler à une altitude fixée, que l’on appelle la portance, est encore la résultante des forces de pression sur leur périphérie. La nouveauté tient d’abord à la vitesse de ces objets : les avions à l’arrêt sur les aéroports ne peuvent pas s’envoler [4], ils ne parviennent à décoller qu’en roulant et après avoir dépassé une certaine vitesse.
Pour comprendre l’origine de cette portance, plaçons-nous d’abord dans un cas simplifié à l’extrême, en imaginant une aile mince, symétrique, et d’envergure infinie. Le vol de cette aile à une vitesse V devient un phénomène à deux dimensions, illustré sur la Figure 3a. Imaginons un observateur solidaire de cette aile, qui, comme le passager d’un avion, voit le fluide extérieur venir de l’amont avec la vitesse V. Dans le cas où l’aile vole avec une incidence nulle, l’écoulement au-dessus de l’aile, ou le long de l’extrados, et l’écoulement au-dessous de l’aile, ou le long de l’intrados, sont identiques. Les pressions sur l’intrados et l’extrados sont aussi symétriques et la composante verticale de leur résultante ne peut être que nulle : cette aile n’est soumise à aucune portance.
Par contre, lorsque l’aile possède une incidence non nulle, la symétrie est rompue comme le montre la Figure 3b : les lignes de courant se resserrent au-dessus de l’aile et s’écartent au-dessous. Le débit entre deux lignes de courant devant rester constant, la vitesse est d’autant plus grande que les lignes de courant se resserrent. La vitesse de l’air est ainsi plus faible le long de l’intrados que le long de l’extrados. Or, pour ralentir ainsi les particules fluides qui passent le long de l’intrados, il faut bien qu’une résistance s’exerce sur elles. Cette résistance à leur avancement est produite par une surpression qui prend place le long de l’intrados et ralentit localement l’air en le repoussant vers le bas. Il en résulte que la pression le long de l’intrados l’emporte sur celle qui s’exerce sur l’autre face, et que le bilan de ces pressions sur toute la surface de l’aile fait apparaître une force verticale non nulle. L’aile est alors soumise à une portance [5] liée à la vitesse de l’aile et à son incidence.
Dans le cas d’une aile d’avion, l’incidence est imposée par le pilote qui, pour décoller, alors que l’avion roule déjà à une vitesse suffisante, oriente vers le bas les volets arrière. Même s’il ne modifie pas l’incidence de l’aile toute entière, le pilote détruit ainsi la symétrie entre intrados et extrados, et c’est ce qui permet à la portance de se développer et de pouvoir l’emporter sur le poids. Inversement, pour diminuer l’altitude avant l’atterrissage, le pilote réduit l’incidence en remontant les volets arrière pour réduire la portance, voire la rendre négative et faire en sorte qu’elle s’ajoute au poids. Dans le cas d’un oiseau, c’est cet animal qui fait l’effort musculaire nécessaire à l’apparition de l’incidence et de la portance.
Le fait que l’aile ait une certaine épaisseur a pour effet de réduire l’efficacité de ce mécanisme, mais sans en compromettre le principe. En aéronautique, on parle de la finesse d’une aile pour qualifier sa minceur. Les voiles d’un bateau constituent de bons exemples d’ailes minces. Elles sont par ailleurs courbées par le vent qui les gonfle, ce qui accentue encore la dissymétrie et renforce le bilan des pressions, sorte de portance horizontale transmise au bateau par le mât. La combinaison de cette portance sur la voile et de celles exercées par l’eau sur le gouvernail – une autre aile mince – et éventuellement sur la quille – une troisième aile mince – permet même de naviguer par vent contraire. Le becquet arrière des voitures de compétition est aussi conçu pour être soumis à une portance, mais négative celle-ci, c’est à dire dirigée vers le sol comme le poids, de façon à augmenter la tenue de route du véhicule.
4. La portance expliquée par la présence d’un tourbillon
A l’explication de la portance par le bilan des pressions, on substitue souvent une variante strictement équivalente, qui consiste à représenter l’aile portante par un tourbillon. Pour introduire cette notion, et pour bien illustrer le fait que l’épaisseur ne joue pas un rôle primordial, considérons d’abord un cylindre circulaire de longueur infinie placé dans un écoulement venant de la gauche (Figure 4). Dans les conditions (a), la symétrie entre intrados et extrados est complète, le bilan des pressions est nul, ainsi que la portance. Par contre, dans le cas (b), où le cylindre tourne autour de son axe, les positions des deux points d’arrêt opposés se sont déplacées toutes les deux vers le bas, les lignes de courant passant sous le cylindre se sont écartées, la vitesse locale a diminué et la pression locale a augmenté. Au contraire, au-dessus du cylindre, les lignes de courant se sont resserrées, la vitesse locale a augmenté et la pression a diminué. Le bilan des pressions sur toute la surface du cylindre conduit alors à une portance non nulle et proportionnelle à la fois à l’intensité du tourbillon [6] schématisé par la rotation du cylindre et à la vitesse de l’écoulement lointain. Des mâts tournants, analogues au cylindre de la Figure 4, ont bien été imaginés pour propulser des navires, mais leur mise en œuvre s’est heurtée au fait qu’en cas de vent violent il est beaucoup plus difficile de les escamoter que de diminuer la voilure.
Imaginons maintenant que ce ne soit pas le cylindre tout entier qui tourne, mais seulement une couche pelliculaire, une sorte de peau plaquée sur son contour. Pour l’écoulement du fluide ambiant, qui ne ressent que cette peau, le résultat est le même. Le cylindre muni de cette peau mobile est soumis à une portance dont le signe dépend du sens de rotation de la peau.
Mais les ailes des avions ne sont pas recouvertes de peaux mobiles. En fait, ce n’est pas la vitesse des points appartenant à la paroi de l’aile ou du cylindre qui compte, mais la vitesse du fluide au-delà d’une couche fluide très mince, appelée la couche limite. Cette couche limite autour d’une aile est esquissée sur la Figure 5, où son épaisseur est fortement exagérée pour la rendre visible. Elle commence au bord d’attaque, avec une épaisseur initiale très faible, elle s’épaissit progressivement de chaque côté de l’aile, sans aucune symétrie en raison de l’incidence, et les deux couches d’intrados et d’extrados finissent par se rejoindre au bord de fuite pour former le sillage de l’aile. A titre d’exemple, si la distance entre le bord d’attaque et le bord de fuite de l’aile est de l’ordre d’un mètre et si la vitesse est de l’ordre de 100 m/s, ou 360 km/h, l’épaisseur de cette couche limite est inférieure à 1 mm au bord de fuite, où elle atteint son maximum. En raison de cette dissymétrie, la moyenne des vitesses prise sur un contour fermé passant à la frontière externe de la couche limite [7] est non nulle, comme si la surface de l’ensemble de l’aile et de la couche limite était une peau mobile mise en rotation de l’intérieur.
Un tourbillon apparaît donc nécessairement autour de l’aile, lors du décollage. Or, initialement, aucun tourbillon n’était présent. Et cette grandeur est invariante sur des durées courtes par rapport au temps caractéristique du frottement visqueux. Un autre tourbillon, de sens opposé et de même intensité que celui qui engendre la portance, est donc aussi créé, mais celui-ci n’entoure pas l’aile et nous allons voir qu’il ne suit pas l’avion et reste au point de départ.
5. La portance sur une aile d’envergure finie
Il nous reste une étape à franchir pour bien comprendre l’apparition de la portance, en passant d’une aile d’envergure infinie à une aile réelle d’envergure finie. La Figure 6 illustre qualitativement, sans respecter les échelles de longueur, la présence du tourbillon le long de l’aile. Le ralentissement des particules fluides et la surpression sur l’intrados passent par un maximum au milieu de l’aile et s’annulent à ses extrémités. Une variation tout à fait analogue apparaît sur l’extrados, mais changée de signe. Cet effet est donc variable le long de l’envergure, maximum au milieu de l’aile et de plus en plus faible lorsque l’on va vers les extrémités. La grande surpression sur l’intrados pousse l’air du centre vers les extrémités, tandis que la dépression sur l’extrados attire l’air des extrémités vers le centre. On voit ainsi apparaître une composante de vitesse dans le sens de l’envergure, allant du milieu de l’aile vers son extrémité sur l’intrados et dans le sens opposé sur l’extrados. Ces écoulements transversaux conduisent à l’enroulement d’une nappe tourbillonnaire à chaque extrémité de l’aile (Figure 6), qui forme ainsi deux tourbillons marginaux, encore appelés tourbillons de bout d’aile. Cette structure se referme par le tourbillon laissé au point de départ et par le tourbillon créé autour de l’aile, formant ainsi un long tube tourbillonnaire refermé sur lui-même.
Sur la photographie de la partie gauche de la figure 7, c’est la présence d’un nuage au-dessous de l’avion, entraîné dans ces tourbillons marginaux, qui rend ceux-ci visibles. On remarquera que leur diamètre est du même ordre de grandeur que la longueur de chaque aile. Dans le cas du planeur de la partie droite de la figure 7, deux nuages très fins prennent naissance à l’arrière de l’aile [8]. Ils n’occupent que la partie centrale des tourbillons marginaux, au voisinage immédiat de leur axe, où la dépression due à la force centrifuge est suffisante pour engendrer une condensation locale de la vapeur d’eau présente dans l’air. En effet, dans ces conditions, l’air qui porte une assez grande humidité, proche de la saturation, se trouve soumis à un refroidissement local par détente adiabatique (lien vers Thermodynamique). C’est ce qui provoque la condensation de la vapeur d’eau.
La formation en V des groupes d’oiseaux migrateurs (Figure 8) s’explique par le fait que chacun d’eux, excepté le premier, se place dans le courant ascendant du tourbillon marginal de celui qui le précède. Il fait ainsi l’économie d’une partie des efforts nécessaires pour maintenir son altitude. À tout objet ou animal soumis à une portance (avion, planeur, oiseau ou voile) est donc associée la formation d’une très grande structure tourbillonnaire, en forme de long tube refermé sur lui-même. Cette structure s’allonge régulièrement pendant toute la durée du vol. Son intensité est liée à la portance et son énergie est prélevée sur celle fournie à ces objets ou dépensée par ces oiseaux.
Le vol plané des grands rapaces (image de couverture) se révèle d’une efficacité énergétique remarquable. C’est cette efficacité, due à la fois à l’envergure et à la configuration de leurs ailes, qui leur permet de limiter considérablement leurs battements d’ailes. Les planeurs (Figures 7 et 9), privés de moteur et donc incapables de s’envoler, sont d’abord tractés en altitude par un avion. Là, détachés de l’avion, ils sont guidés par le pilote qui recherche les vents thermiques ascendants susceptibles de les emporter encore plus haut, ou tout au moins de maintenir leur altitude. Leur vitesse propre et leur incidence leur confèrent bien une portance, mais ils sont aussi entraînés par les courants locaux, aussi bien verticalement qu’horizontalement.
Les balles et les ballons sont des exemples d’objets volants de très petite envergure. La portance liée à l’existence d’un tourbillon permet d’expliquer leurs trajectoires parfois étonnantes, comme celles des balles de tennis ou de ping-pong, plus ou moins bombées par le mouvement de la raquette. Lorsque la raquette brosse la balle en passant par dessus, la trajectoire est fortement bombée vers le haut. La balle est dite liftée (du mot anglais lift qui désigne la portance) ; elle est dite coupée ou slicée (du mot anglais slice, tranche) lorsque la raquette brosse la balle en passant par dessous. La trajectoire courbée dans le plan horizontal du ballon de football qui, parti du point de corner, pénètre directement dans la cage du gardien de but est un autre exemple.
Les hydroptères sont des bateaux dont la carène est capable d’émerger hors de l’eau quand leur vitesse dépasse une certaine limite (Figure 10), grâce à la portance exercée sur une aile relativement mince, qui demeure immergée. Cette aile est située sous la carène, aux extrémités de jambes de force qui la relient à la carène. Dans certains cas c’est un ensemble d’ailes qui assurent cette portance, ce qui améliore la stabilité de l’hydroptère. Le grand avantage des hydroptères par rapport aux navires consiste à réduire la traînée en minimisant le maître couple [9]. On lira dans l’article Résistance à l’avancement et traînée (lien) que cette traînée est proportionnelle au produit de l’aire du maître couple par le carré de la vitesse. Ainsi, au lieu du maître couple total de l’ensemble de la carène et de l’aile – par exemple 4,5 m2 -, lorsque l’hydroptère déjauge celui de l’aile est fortement réduit, disons à 0,5 m2, ce qui signifie qu’il peut être divisé par 9. Alors, puisque la traînée est proportionnelle au produit de cette aire par le carré de la vitesse, la vitesse de l’hydroptère peut être 3 fois plus grande que celle d’un navire construit sur la même carène sans l’aile immergée.
Références et notes
Photo de couverture : vol plané d’un vautour fauve illustrant l’existence d’une portance capable de compenser son poids. [Source : Diverticimes]
[1] Archimède, né à Syracuse vers 287 av. J.C. et tué lors du siège de cette ville en 212 av. J.C., est l’un des grands scientifiques de l’Antiquité grecque. Ses principales découvertes portent sur la statique et l’hydrostatique. Deux d’entre elles portent encore son nom : la poussée d’Archimède et la vis d’Archimède.
[2] Le centre de gravité d’un volume est son centre de masse, ou barycentre, dans l’hypothèse où il serait rempli d’un milieu homogène. Le centre de gravité d’une surface est défini de la même façon, mais à deux dimensions.
[3] Toute surface plane possède deux axes principaux orthogonaux passant par son centre de gravité. Dans le cas de la surface de flottaison d’un navire, ce sont l’axe de symétrie qui va de la proue à la poupe et l’axe perpendiculaire. Le moment quadratique par rapport à chacun de ces axes s’exprime de façon générale par une intégrale ; il est souvent dénommé moment d’inertie. Dans le cas particulier d’un rectangle de grand côté L et petit côté l, l’expression du moment quadratique par rapport au grand axe est Ll3/12. Dans le cas d’un navire de surface, si le volume de la carène peut être approché par Llh, où h est proportionnel au tirant d’eau, le rayon métacentrique a pour expression MC = l2/12 h.
[4] L’envol des hélicoptères, des oiseaux et des insectes est dû au mouvement de leurs pales ou ailes, rotation pour les premiers, battement rapide pour les seconds, ce qui constitue une différence majeure par rapport aux avions, dont les ailes demeurent immobiles. Le décollage vertical de certains avions de chasse résulte d’une autre poussée exercée par le jet issu des réacteurs.
[5] La théorie de cette portance, due aux mécaniciens des fluides Martin Wilhelm Kutta, allemand (1867-1944), et Nikolaï Joukowsky, russe (1847-1921), aboutit à la formule de Kutta-Joukowsky pour la portance : P = ρVΓ, où ρ désigne la masse volumique du fluide, V sa vitesse au loin et Γ la circulation de la vitesse sur le contour fermé de l’aile.
[6] L’intensité du tourbillon est le flux du vecteur tourbillon (rotationnel de la vitesse) à travers la section droite de l’aile. Cette grandeur est égale à la circulation de la vitesse sur le contour de l’aile, introduite dans la note [5] et notée Γ.
[7] Cette moyenne de la vitesse sur le contour de l’aile est proportionnelle à une grandeur importante : la circulation de la vitesse sur ce contour fermé Γ, qui est d’ailleurs égale à l’intensité du tourbillon.
[8] On prendra garde à ne pas confondre ces longs tubes nuageux, éventuellement présents sur l’axe des tourbillons marginaux, avec les grandes traînées bien visibles dans le sillage des avions à réaction. Ces dernières sont dues à la condensation de l’importante quantité de vapeur d’eau issue de la combustion et éjectée par la tuyère à l’aval des réacteurs. Ces signatures aériennes du passage d’un avion à réaction sont toujours visibles, même dans un anticyclone puissant et dans un air sec.
[9] Dans le vocabulaire marin, toute section de la carène perpendiculaire au grand axe est appelée couple et la plus grande d’entre elles est appelée le maître couple.
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Pour citer cet article : MOREAU René (20 septembre 2018), Poussée d’Archimède et portance, Encyclopédie de l’Environnement. Consulté le 4 octobre 2024 [en ligne ISSN 2555-0950] url : https://www.encyclopedie-environnement.org/physique/poussee-darchimede-portance/.
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